Pour les quelques uns qui seraient passés à côté de cet événement majeur de la vie politique et culturelle française…
Apprenant l'agression de l'armée israélienne contre les navires pacifistes qui voguaient vers Gaza au moment du bouclage de leur programme, les cinémas Utopia ont tenté de réagir, à leur niveau, en reportant la programmation d'un "joli petit film" israélien A cinq heures de Paris et en proposant à la place des séances du film Rachel (de l'israélienne Simone Bitton, sur le destin tragique de Rachel Corrie qui a donné son nom à l'un des navires de la flotille).
Aussitôt, hurlements indignés de la plupart des éditorialistes de la presse française, intervention du Ministre de la Culture (pourquoi pas) et du Maire de Paris (?) pour condamner un infâme et inacceptable acte de censure… d'un film qui sera visible dans 80 salles en France, y compris à l'Alhambra, y compris mais un peu plus tard dans les salles Utopia.
Beaucoup plus discrètes, les réactions de soutien à cette initiative, dont cette lettre signée de réalisateurs et de responsables culturels israéliens (parmi lesquels l'auteur d'Ajami, récemment programmé).
Voilà le site israélien sur lequel on peut lire le texte en hébreu et traduit en suivant.... et ci-dessous la traduction en français.
http://wp.me/pSHB5-hCr
Merci Utopia !
Nous soussignés, citoyens israéliens, cinéastes, enseignants et ouvriers de la culture, nous souhaitons remercier le circuit des salles Utopia pour leur décision de décaler la programmation du film israélien “A 5 heures de Paris” et de programmer le film “Rachel” en réaction à l’attaque menée par l’armée israélienne sur la flottille de la Liberté. “Rachel”, de la cinéaste marocaine-israélienne-française Simone Bitton, raconte l’histoire de Rachel Corrie, une militante américaine de 23 ans écrasée par un bulldozer de l’armée israélienne alors qu’elle se posait en bouclier humain pour les habitants de Gaza. Un des bateaux de la flottille “Free Gaza” repoussée par les bulldozers israéliens portait le nom de Rachel Corrie. La décision du réseau Utopia a été prise au moment où le bateau “Rachel Corrie” faisait route vers la Bande de Gaza sous blocus et alors que la comédie sentimentale “A 5 heures de Paris” sort dans 50 salles à travers la France.
Nous voyons dans la décision d’Utopia la continuation d’une longue tradition de programmation de films israéliens et palestiniens et d’un engagement profond aux côtés de la culture, des spectateurs et des cinéastes. C’est à la lumière de cet engagement qu'Utopia a modifié son programme et a proposé à ses spectateurs de connaître en profondeur la réalité à Gaza – à travers les yeux d’une cinéaste israélienne. Il ne s’agit pas de censure. Personne n’appelle au boycott des artistes israéliens. Il s'agit d'un acte de solidarité citoyenne, solidarité avec les civils palestiniens de Gaza, avec les membres du mouvement international de solidarité et avec des citoyens israéliens comme nous, qui aspirent à une vie fondée sur l’égalité et la justice en Israël-Palestine.
Malheureusement, la machine de propagande israélienne utilise également la création artistique, y compris le cinéma, pour donner d'Israël l’image d’un Etat démocratique et éclairé, afin de camoufler des crimes de guerre, la ségrégation, l’occupation et la répression.
L'establishment israélien inaugure des campagnes de “repositionnement” publicitaire et des opérations d'image de marque en collaboration avec le ministère des affaires étrangères et celui de la culture, alors qu'en Israël, la ministre de la culture répète que "le cinéma israélien prouve à chaque fois que la culture est la meilleure ambassadrice de l’Etat”. La même ministre s'en prend violemment et publiquement à toute critique de l’occupation et de l'apartheid, que celle-ci soit exprimée par des artistes citoyens israéliens ou étrangers.
Le gouvernent israélien emploie un appareil de terreur et de censure contre toute possibilité d’expression artistique palestinienne libre. Cet appareil persécute des artistes et des intellectuels palestiniens, empêche des projections de films, des conférences académiques et des évènements culturels. Et interdit l’entrée sur le territoire aux artistes et intellectuels internationaux qui souhaitent exprimer leur solidarité avec les opprimés.
Nous refusons de faire partie de cette machine bien huilée de propagande, nous refusons de prendre part au camouflage de l'occupation et de la répression et de contribuer à la création d’une image de “démocratie éclairée”. Nous refusons toute tentative de transformer le persécuteur en persécuté, et l’agresseur en agressé – que ce soit dans les eaux internationales ou dans le monde de la culture.
Nous sommes heureux que les gens d’Utopia soient nos alliés et partenaires dans notre combat pour l’égalité et la justice.
Merci Utopia !
Premiers Signataires :
Hannan ABU-HUSSEIN, artiste visuel
Udi ALONI, réalisateur
Ariella AZOULAY, cinéaste et essayiste
Mohammad BAKRI, réalisateur et comédien
Saleh BAKRI, comédien
Daphna BARAM, écrivaine
Yael BERDA, sociologue, poète
Tamar BERGER, écrivaine
Haim BRESHEETH, cinéaste et universitaire
Amit BREUER, productrice
Shai CARMELI POLLAK, réalisateur
Sami Shalom CHETRIT, cinéaste, écrivain, poète
Scandar COPTI, réalisateur
Yasmeen DAHER, poète
Anat EVEN, réalisatrice
Jack FABER, artiste visuel
Avner FAINGULERNT, réalisateur, directeur de l'école de cinéma Sapir à Sderot
Yael FREIDMAN, enseignante en cinéma
Gali GOLD, universitaire, programmatrice de cinéma
Natalie HAZIZA, réalisatrice
Ala HLEHEL, écrivain et scénariste
Avi HERSHKOVITZ, réalisateur
Rachel Leah JONES, réalisatrice
Hagit KEYSAR, artiste visuelle
Makram KHOURY, comédien, metteur en scène
Yael LERER, éditrice, éditions Andalus
Aim Deuelle LUSKI, universitaire, artiste visuelle
Yosefa LOSHITZKY, universitaire,
Juliano MER-KHAMIS, cinéaste, metteur en scène, comédien
Erez MILER, artiste visuel
Ruchama MARTON, présidente de PHR
Rela MAZALI, écrivaine
Amal MURKUS, chanteuse
Dorit NAAMAN, universitaire, vidéaste
Idit NATHAN, artiste visuelle
Judd NE'EMAN, réalisateur, lauréat du Prix Israël du Cinéma
Ofer NEIMAN, universitaire
Ilan PAPPE, historien
Erez PERI, directeur du Festival des Films de Sud à Sderot
Zmira RON, metteur en scène
Oz SHELACH, écrivain
Eyal SIVAN, réalisateur
Renee SIVAN, muséologue
Mati SHEMOELOF, poète
Amir TERKEL, cinéaste
Eran TORBINER, réalisateur
Einat WEIZMAN, comédienne