Reconstitueurs reconvertis en acteurs pour le besoin d'un tournage, les
soldats de l'Association Napoléonienne du Boulonnais étaient mardi soir à Calais
pour découvrir le film de Denis Dercourt
Ils sont arrivés place du Soldat Inconnu, au pied de l'Hôtel de Ville, avec
leurs uniformes du 4e régiment d'infanterie légère dans les coffres de leurs
voitures.
Quelques minutes plus tard, en bon
ordre, les membres de l'ANB se sont rangés devant la façade du cinéma
l'Alhambra, impatients de se voir sur grand écran.
Durant plusieurs jours, en
forêt de Rambouillet, 47 d'entre eux avaient vécu une aventure inoubliable à
l'occasion du tournage du sixième film de Denis Dercourt intitulé "Demain à
l'aube" dont le scénario raconte l'histoire d'un pianiste, professeur et
concertiste, interprété par Vincent Pérez, qui va vivre une aventure étrange et
dramatique à travers la passion de son jeune frère (Jérémie Renier) adepte de
reconstitution comme le sont de nos jours environ 2 500 de nos compatriotes se
réunissant en France et dans toute l'Europe durant leur temps libres pour
revivre l'époque napoléonienne.
Ce film plongeant le public dans le monde à
la fois étrange et fascinant des jeux de rôle pour reprendre une expression plus
tendance a obtenu dès sa sortie le 12 août dernier des critiques plutôt bonnes.
Outre l'intrigue assez captivante emmenée par un excellent Vincent Pérez, il
permet de découvrir un univers que les reconstitueurs connaissent bien où l'on
trouve des gens de toutes conditions entraînés par la même passion mais
certainement pas illuminés par une dévotion aveugle à l'égard de l'Empereur
Napoléon 1er.
Des citoyens
comme les autresMichel Lamesch,
le président de l'ANB, absent du tournage pour ne pas avoir pu obtenir les jours
de congés nécessaires, tient d'ailleurs à souligner qu'il ne faut pas croire que
ces hommes, femmes et enfants partageant la vie d'un bivouac l'espace d'un
week-end sont des fous de Napoléon. «
Ce qui nous motive, c'est la beauté des
uniformes de cette époque. Nous avons un rôle social, pédagogique, touristique,
tel est l'esprit de notre association.
Après chaque représentation, on
redevient aussitôt des citoyens de notre époque. On tombe l'uniforme et on se
fait une petite fête entre-nous, tout simplement ».
Amitié, convivialité,
complicité sont des termes qui reviennent souvent dans la bouche de celui qui
endosse l'uniforme d'un général avec une certaine élégance et tient le rôle d'un
officier supérieur proche de ses hommes mais qui ne badine pas pour autant avec
la discipline. «
Le premier qui crie "c'est moi !", je l'étrangle... »
dit-il en plaisantant juste avant la diffusion des premières images sur le grand
écran de l'Alhambra. Et personne ne bronchera si ce n'est que quelques murmures
à peine, et des applaudissements au moment du générique de fin ou apparaissent
le nom de l'ANB et de ceux qui ont prêté leur concours au film.
En fait, on
ne verra les membres de l'association que quelques minutes, précisément lors
d'une séquence retraçant plutôt fidèlement l'atmosphère d'un bivouac et d'une
courte scène de bataille où les soldats disposés en ligne s'envoient quelques
décharges de fusils, cette dernière prise de vue ayant été réalisée à La
Capelle.
« Il a osé... » À l'issue de la projection, Michel
Lamesch s'est adressé au public, livrant ses commentaires à chaud. «
Vu le
temps passé, les déplacements occasionnés, toutes les contraintes techniques,
c'est vrai que la présence dans le film de nos membres est assez limitée avec
toutefois pas mal de gros plans mais je dois reconnaître que s'il fallait
dresser un bilan, ce film est une réussite pour l'association, à la fois humaine
et financière. J'ai apprécié la partie consacrée au bivouac, remarquablement
retranscrite, la beauté des images, ces lumières de l'aube naissante ou de fin
de journée. On nous avait prévenus qu'il s'agissait d'une fiction et tout a été
respecté. Il ne faut pas bien sûr nous comparer à ces hussards qui n'ont que
le duel à livrer entre eux pour un honneur bafoué à la bouche mais, il
est tout à fait exact que ces cavaliers étaient à leur époque de vrais
"barjots". » Le président de l'ANB tint aussi à relever combien ce tournage
avait représenté une grande expérience de vie, une belle image de la vie
associative telle qu'il la conçoit avant de se féliciter d'avoir vu le cinéma
l'Alhambra, le seul dans la région, choisissant de programmer "Demain dès
l'aube". «
Il a osé et je le remercie » dit-il en s'adressant à Arnaud
Clappier, le directeur de l'établissement. Une démarche aura permis à l'Alhambra
d'apporter une fois de plus une certaine animation alliée à la découverte d'un
film qui ne figurera peut-être pas au box office mais mérite d'être vu et
apprécié à sa juste valeur. Il n'en manque pas.
Hervé DEGUINES
La
période napoléonienne sera à nouveau d'actualité le vendredi 11 septembre
prochain à partir de 18h à l'auditorium du Musée de Calais avec la conférence
sur le Maréchal Lannes donnée par Ronald Zins, ancien président du Souvenir
Napoléonien qui présentera à cette occasion l'ouvrage consacré à ce célèbre
personnage que Napoléon considérait comme son meilleur ami, décédé le 31 mai
1809 des suites d'une blessure reçue à la bataille d'Essling.