Le docteur Abarqawi, chirurgien de l'hôpital, est allé opérer en janvier dans 
un hôpital de Gaza. Il y a rencontré une jeune patiente, Amira, gravement 
blessée. Elle est arrivée à Calais pour une nouvelle intervention
Amira a 15 ans. Derrière ses yeux marrons juvéniles, des images de 
guerre, de violence. De mort aussi, celle de sa soeur, de son père et de son 
frère.
 
La jeune fille arrive de Palestine via la 
Norvège. La guerre a détruit une partie de ses racines ainsi que sa maison d'un 
quartier de Gaza Ville en janvier dernier. Bilan : des blessures 
psychologiques et une très méchante fracture ouverte à la cheville droite. 
Durant trois jours, elle est restée sans soins, puis elle s'est traînée en 
marchant sur les mains dans une maison voisine à plus de 500 mètres. Elle se 
réfugie chez un journaliste et s'excuse d'emblée pour cette entrée presque en 
infraction. Son hôte la découvre blessée, assoiffée et comprend l'urgence de la 
situation. Amira est conduite dans un hôpital où le docteur Abarqawi, chirurgien 
du centre hospitalier de Calais, est allé opérer bénévolement. L'opération 
chirurgicale est une double urgence : problème de fracture et problème 
d'infection. Les cicatrices psychologiques seront peut-être plus longues à 
soigner que les conséquences traumatiques de la blessure.
Avec cette 
rencontre, Amira est déjà une sorte de miraculée. Un autre événement complète 
cette rencontre : Amira a quitté son pays, dûment munie d'un visa lui 
permettant d'arriver en France. Elle est arrivée en France mercredi, elle était 
à Lille ce week-end. Et à Calais depuis dimanche après-midi. Le docteur Abarqawi 
a pu revoir hier sa jeune patiente, elle devrait entrer à l'hôpital aujourd'hui 
et passer en salle d'opération demain.
Amira ne parle ni le français ni 
l'anglais. Elle est accompagnée par sa tante qui ne parle elle aussi que 
l'arabe.
Se rétablir avant
le retour au pays 
« Dès 
que j'ai vu Amira dans cet hôpital de Gaza, je m'étais dit qu'il serait bien que 
je puisse la revoir, résume le chirurgien. Comme tous ces enfants, 
victimes de la guerre, blessés dans leur sang et dans leur chair. Mais il est 
très difficile de pouvoir les faire sortir pour les soigner à l'étranger, pour 
des raisons diplomatiques et politiques. Parce que ce n'est pas bon de laisser 
voir de si jeunes victimes des combats. » Pourtant, Amira a pu franchir 
les frontières et être prise en charge par une association humanitaire et 
médicale, PalMed. Dont les membres connaissaient l'engagement du 
praticien.
« Le départ d'Amira, qui signifie "princesse", s'est fait 
dans la précipitation, confirme Françoise Lurot, présidente de l'association 
Amitiés Calaisis Palestine. Pour l'anecdote, elle a fait route jusqu'en 
Norvège avec une équipe de football. » À Calais, Amira et sa tante ont 
été hébergées dans un hôtel réglé par l'association locale, avant d'être prises 
en charge dans une famille d'accueil. «  Famille qui, elle, parle 
arabe », complète la présidente de l'association, dont le docteur 
Abarqawi est le vice-président.
Dans quelles conditions matérielles pourra se 
dérouler l'opération d'Amira ? Cette question-là n'est pas encore résolue. 
Les prises en charge de la Sécu ne s'appliquent pas en pareil cas. Mais le 
chirurgien est confiant, et l'intervention se fera. « Une première 
intervention », ajoute-t-il puisque d'autres soins seront encore 
nécessaires pour la jeune fille. D'abord, il va falloir regarder l'état de la 
cheville de l'adolescente puisqu'elle n'a plus reçu aucun soin depuis la 
mi-janvier. Ensuite, il y a une rééducation du membre à rattraper. Et une 
indispensable rééducation... qui pourrait se faire peut-être à Berck. 
« Là-bas, chez elle, rien n'est possible. Il n'y a pas de rééducation et 
le matériel médical n'arrive pas à Gaza, il est stoppé bien avant. » Le 
visa d'Amira et de sa tante expirera bien avant le rétablissement de la jeune 
fille. Qui n'aspire qu'à une chose : rentrer chez elle, retrouver ses 
racines. Et le reste de sa famille.
Laurent GEUMETZ

 « Nous sommes dans l'action concrète, sur le 
terrain. » Françoise Lurot, la présidente de l'association Amitié 
Calaisis Palestine, suit depuis des mois le cas de la jeune Amira. 
« Aujourd'hui, elle est à Calais, avec nous, elle est notre priorité, 
mais il y a encore beaucoup d'autres enfants dans ce cas. » Des 
centaines ? « Non, plutôt des milliers », estime le 
docteur Abarqawi, chirurgien et vice-président de 
l'association.
« Notre travail est d'abord un travail d'information 
sur ce qui se passe vraiment au sein de ces territoires , complète 
Françoise Lurot. Nous avons aussi comme but, au sein de l'association, 
d'aider les populations en envoyant du matériel médical. » Pour 
soutenir l'association, les dons sont les bienvenus.
* Contact : 
Association Amitié Calaisis Palestine, 06.71.16.95.92. Adresse mèl : 
fralurot@orange.fr